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Toi qui viens d'Ethiopie...
21 novembre 2005

Le Lac Tana

sur_le_lac_tanaLe lac est situé à 1840 m d'altitude; il a une longueur de 85 km du nord au sud et une largeur de 65 km d'ouest en est (3630 km2 de superficie) et 14 m de profondeur en moyenne. Il compte trente îles et trente-huit monastères, dont certains - Tana Qirqos, Kebran Gabriel, Dega Estifanos - sont fermés aux femmes, ainsi que 60 affluents. Le plus célèbre d'entre eux est le petit Abbai, également appelé le petit Nil bleu, qui prend sa source à 2900 m d'altitude dans les montagnes de l'Agaumeder et se jette, après environ 65 km de course, dans le lac Tana, en formant un petit delta au sud-ouest du lac. L'on peut atteindre les sources mythiques du Nil bleu en organisant une expédition pédestre de trois jours à partir du delta à l'ouest de la péninsule de Zeghè ou une excursion de 2 jours en voiture tout-terrain en passant une nuit sur place sous tente (364 km aller/retour à partir de Bahar Dar, dont 60 km de piste difficile). Le lac a un seul émissaire : le Nil bleu.

Le lac Tana est d'origine volcanique et de nombreuses éruptions ont probablement modifié son niveau au cours des millénaires. Des terrasses lacustres situées à une centaine de mètres au-dessus du niveau actuel du lac témoignent de ces changements.


Le lac, déjà connu par Ptolémée qui le nomma Choloe palus («marais creux») recèle des signes évidents - bétyles à section carrée à Dega Estifanos et stèles anthropomorphes - de fréquentation ancienne, probablement axoumite. Il devient le centre politique de l'Ethiopie à la fin du 13e siècle lors du retour au pouvoir de la dynastie salomonide, après la chute de la famille Zagoué.

Le plus célèbre de ces empereurs salomonides fut Amda Syôn Ier (1314-1344), petit-fils de Yékouno Amlak. Les trente ans de son règne furent très importants pour l'édification du royaume chrétien sur les plateaux et jusqu'aux rivages de la mer Rouge. Grand, fort, poète et mécène, il remplit les annales éthiopiennes de ses gestes et passa à l'histoire comme une sorte de Richard Cœur-de-Lion éthiopien. Les sultans devinrent ses vassaux et durent lui payer un tribut en étoffes, soie et lin. Le christianisme fut déclaré religion d'Etat. On assista à la fondation de nombreux monastères sur le lac Tana et dans les régions avoisinantes. Amda Syôn fut le vrai protagoniste du 14e siècle et le véritable fondateur de la nation éthiopienne.


LE CAP DE MENDABBA

 Le cap, ainsi que la petite baie adjacente (accès interdit aux femmes), sont situés à 25 min de bateau au nord de Gorgora. On y trouve l'église-monastère de Medhane Alem. Les moines vivent dans des toukouls plantés au sommet de la colline. L'église a été fondée par le fils d'Amda Syôn, Abba Assay, qui arriva sur les lieux en traversant le lac à l'aide d'une grosse pierre flottant miraculeusement. Les habitants de l'île stupéfaits s'exclamèrent en le voyant : «Qui d'autre peut être comme lui?» (en langue locale Man in dabba). D'où le nom de l'île.

ILE DE SELASSIE

 Située dans la partie nord du lac à une heure environ de bateau de Gorgora, l'île est connue pour une vaste grotte qui aurait été taillée, selon la légende, par Lalibela. A l'intérieur de cette grotte, un saint moine aurait par la suite construit deux églises, une pour les femmes et une pour les hommes, dont il reste quelques ruines.

ILE DE DEK

Du port de Bahar Dar un bateau à moteur permet d'atteindre en deux heures l'île de Dek, située à mi-chemin entre Bahar Dar et Gorgora, au milieu du lac, à une trentaine de kilomètres de Bahar Dar. L'île quasi circulaire, d'un diamètre de 5 km, est recouverte de végétation et de cultures de tef et de café. Les produits de l'île, mangues, papayes, bananes et café, sont transportés par les habitants (un millier de personnes environ) jusqu'au marché de Bahar Dar sur des tankwa, petites pirogues en papyrus. Avec le produit de leurs ventes, ils achètent des objets et denrées de consommation courante et, entre autres, des vaches, que l'on amène dans l'île à bord de grandes tankwa destinées spécialement à ce transport. La construction d'une tankwa exige le travail de deux personnes durant une journée entière. En cas de pluie ou par mauvais temps, ces embarcations qui normalement ont une durée de vie de quelques semaines sont utilisables quelques jours seulement.

A l'extrémité ouest de l'île, l'îlot de Narga est habité uniquement par des prêtres. Du débarcadère, un petit chemin conduit à la superbe église de Narga Sélassié, église impériale de type gondarin, dédiée à la Trinité. La légende raconte que le site fut choisi par la reine Mentwab, mère de Iyasou II (règne: 1730-1755). On raconte que la reine qui venait de Gondar avec sa suite portant le tabot, fati­guée du voyage, s'assoupit au pied d'un grand arbre. Dans un rêve, elle reçut de Dieu l'ordre de construire l'église à cet endroit et à son réveil elle s'exclama Narga! qui veut dire «construisons». Les matériaux nécessaires à la construction de l'église, blocs de basalte et chaux, furent apportés de Gondar. La porte fut taillée dans le tronc de l'arbre sous lequel la reine avait eu son rêve. L'église représente un des plus beaux exemples d'architecture éthiopienne à plan circulaire. Elle est entourée d'une grande enceinte, renforcée par des tours carrées surmontées d'une coupole en pur style gondarin. A l'intérieur, les quatre parois du Maqdas sont décorées de magnifiques peintures. 

La paroi ouest sur laquelle ouvre la porte principale reprend le thème del a Rédemption. On y trouve représentés : l'Annonciation, la Nativité, le Baptême de Jésus, le Mont des Oliviers, la Passion du Christ (capture, flagellation et crucifixion), ainsi que saint Georges et une magnifique Vierge à l'Enfant, au pied de laquelle on retrouve, couchée, la reine Mentwab. A gauche de la porte est représenté l'Archange Mikaël qui libère une âme du pouvoir du démon. Au centre, sur le battant gauche, le passage de la mer Rouge avec Moïse ouvrant les eaux et l'armée du pharaon qui périt misérablement. En haut, sur le battant de droite, le Cantique des femmes israélites, en bas, Aaron et les Hébreux. A droite de la porte, l'église construite sur le dos d'un monstre marin, l'archange Raphaël qui le transperce de sa lance pour l'empêcher de faire tomber l'église dans les flots. Sur le tambour sont représentées les trois personnes de la Trinité, encadrées par les quatre animaux célestes. Au pied de la Trinité, Adam et Eve, séparés par l'arbre de vie. A droite et à gauche de la Trinité, les vingt-quatre prêtres célestes de l'apocalypse, avec leur encensoir.

Sur la paroi sud, premier registre du haut, de gauche à droite : Joachim et Anne, Marie présentée au temple, la circoncision de Jésus, l'adoration des rois Mages. Jésus présenté au Temple. Sur le deuxième registre: le roi Hérode et le massacre des innocents. Marie qui accepte de subir l'épreuve de l'eau maudite, afin de prouver sa virginité après la conception de Jésus. A gauche de la porte, la fuite en Egypte et à droite, la dormition de la Vierge avec le roi David jouant de la lyre et le couronnement de la Vierge. Sur la porte sont représentés les miracles de Marie, ainsi que le cannibale de la ville de Qemer. grand pécheur qui, après avoir dévoré amis, parents, femme et enfants, accepta un jour d'offrir de l'eau à un lépreux assoiffé qui le lui avait demandé, au nom de Marie. Ce geste le sauvera de l'Enfer. Sur le tambour est représentée l'apparition de la Vierge Marie au monastère égyptien de Metmaq.

Sur la paroi est, premier registre en haut, de gauche à droite : la fuite en Egypte; un arbre ouvre son tronc pour cacherla Sainte Famille, poursuivie ; un ange du ciel apporte de la nourriture à la Sainte Famille ; rencontre avec des brigands ; la Vierge qui allaite l'Enfant. Sur le deuxième registre : les Tentations de Jésus ; Jésus qui parle aux apôtres ; la Résurrection de la fille de Jaïre ; Marie-Madeleine ; Jésus qui marche sur les eaux. En bas, à gauche de la fenêtre, la rnort de Jésus et la descente aux enfers. A droite de la fenêtre, l'entrée à Jérusalem. Sur la fenêtre de gauche à droite : l'apparition de Jésus à l'apôtre Thomas ; l'archange Mikaël et des fidèles de la Vierge ; la Vierge et l'archange Gabriel et des fidèles. Sur le tambour, l'Ascension de Jésus entouré d'anges musiciens.

Sur la paroi nord, premier registre en haut, de gauche à droite : des saints guerriers à cheval et saint Georges. A gauche de la porte : la Sainte Trinité et les quatre animaux célestes ; l'apparition de Dieu à Abraham ; le buisson ardent ; les Tables de la Loi ; Eve sortie de la côte d'Adam ; Adam et Eve au Paradis terrestre ; Dieu parle à Adam et Eve, nus ; le sacrifice d'Abraham ; le rêve de Jacob. A droite de la porte : saint Georges, roi des martyrs. Sur le battant gauche de la porte, l'archange Mikaël et sur le battant droit, l'archange Gabriel qui libère du feu les trois enfants à Babylone. Sur le tambour, la Transfiguration.

Sur l'île, a 1 km du village de Gadnà, est située l'église de Kota Maryam fondée au temps de l'empereur Lebna Denghel par l'Abouna Hirute Amlak. originaire du Choa, et destinée à un monastère pour femmes, à proximité du monastère de Déga Estifanos, sur l'île voisine, qui avait été réservé, lui, aux hommes. Les dons des rois de Gondar, en particulier ceux de Fasilades, ont contribué à enrichir l'église. Elle est aujourd'hui ouverte aux hommes et aux femmes.

Une troisième église mérite la visite. Il s'agit de l'église d'Arsima, située à proximité du village du même nom. Cette petite et merveilleuse église-paillote serait, par son ancienneté, la deuxième église de l'île. Elle possède un trésor intéressant constitué d'anciens manuscrits, dont un tétra évangile. 

ILOT DE DEGA ESTIFANOS

A l'est de l'île de Dek, un îlot formé par un cône volcanique haut de 90 m marque le milieu du lac. Cette île, interdite aux femmes, porte le nom de Déga Estifanos, du nom de la célèbre église-monastère, une des plus importantes du lac, autour de laquelle vit encore aujourd'hui une communauté comptant de nombreux moines. L'église, de forme rectangulaire, fut restaurée par l'empereur Yohannes IV au milieu du 19e siècle. Quelques peintures sur les parois du maqdas datent encore de l'époque de sa fondation (16e s.). Une cabane abrite, dans des sarcophages en verre offerts par l'empereur Hailé Sélassié, les momies de quelques-uns parmi les plus importants empereurs de la deuxième dynastie salomonide: Zahra Yaqob, Davit Ier, Susenyos et Fasilades.

PENINSULE DE ZEGHÈ

Située à une quinzaine de kilomètres de Bahar Dar, la péninsule de Zeghè est entièrement recouverte d'une végétation très dense. En plus des importantes plantations de caféiers, on trouve de grands arbres portant le nom de l'explorateur Bruce, l'Erythrine brucei, ainsi que des genévriers géants et de magnifiques sycomores. Au cœur de cette végétation luxuriante se dissimulent sept églises et de nombreux villages.

L'église d'Uhra Kidane Mehret est la plus facile à visiter au départ de Bahar Dar. On l'atteint par un joli chemin dans la forêt (15 minutes à pied des rives du lac). De nombreux prêtres et quelques hommes armés de mousquetons et de baïonnettes gardent le site contre les éventuels voleurs qui tenteraient de s'emparer des objets sacrés et des anciens manuscrits gardés jalousement dans l'église.

L'église de Batra Maryam est située sur le côté nord de la péninsule et fut fondée, selon la tradition, par un saint prêtre qui, après en avoir terminé la construction, cassa son bâton de prière en trois morceaux et planta ces derniers dans le sol. Le premier morceau donna des plants de caféiers, le deuxième des citronniers et le troisième des arbustes de houblon, utilisé pour la production de la bière. A proximité, l'église de Zeghè Ghiorghis possède un petit musée intéressant.

ILE DE TANA KIRKOS

L'île, allongée, s'étire parallèlement au rivage dans la partie occidentale du lac. Il fut un temps où son église était la plus importante du lac. Les prêtres prétendent qu'elle fut fondée par Abreha et Atsbeha (4e siècle), alors que l'expansion du christianisme semble en réalité avoir atteint la région du lac seulement mille ans plus tard. C'est ici que, selon la tradition, l'Arche d'Alliance a été gardée pendant plus de six siècles, avant d'être transportée à Axoum. La Sainte Famille aussi aurait séjourné dans cette île trois mois et dix jours, lors de la fuite en Egypte.

Les habitations des moines sont adossées à une grande lame de basalte (un dyke) qui parcourt l'île. L'église, de forme rectangulaire, est bâtie en pierre. Il s'agit de pierres taillées de grande taille, qui pourraient provenir d'un édifice beaucoup plus ancien. Les prêtres montrent volontiers l'endroit où était entreposée l'Arche, ainsi que la pierre sur laquelle, d'après la tradition, la Sainte Vierge avait l'habitude de s'asseoir. Le site est marqué par deux bétyles qui présentent chacun un trou, surmontés d'un bloc de basalte carré, parfaitement taillé et portant en son milieu une cavité de la même forme.

ILE DE KEBRAN

 En retournant en bateau vers Bahar Dar, on dépasse l'île de Kebran, qui cache en son sommet l'église de Kebran Gabriel. Après 10 minutes de marche dans une forêt épaisse, deux phonolithes et une cloche de bronze annoncent l'arrivée à l'église-monastère dédiée à saint Gabriel. Selon la légende, son fondateur serait l'Abouna Za Yohannes, originaire du Choa. Un jour, alors qu'il venait de Gondar, il fut surpris par la nuit et fut accueilli dans une paillote dont le propriétaire était un pauvre pêcheur. Quand le saint rentra dans la maison, la pauvre hutte se remplit par miracle de nourriture. Les filets eux aussi se remplirent de poissons alors que les autres jours, la pêche avait été maigre. Le matin venu, le saint demanda au pêcheur le nom de l'île qui se trouvait en face du rivage et voulut la visiter. Ils partirent avec une pirogue en papyrus mais soudainement le saint quitta la pirogue et, à la grande frayeur du pêcheur, atteignit en quelques instants l'île en volant sur l'eau. La population de l'île vint à sa rencontre en lui racontant que l'île était habitée par un dieu alligator-serpent auquel elle devait rendre des sacrifices humains. L'Abouna Za Yohannes essaya de leur dire que leur Seigneur était Jésus-Christ. «Comment pourrions-nous le savoir?», s'exclamèrent les habitants de l'île. «Donne-nous une preuve que Jésus est notre Dieu ! ». Le saint tua alors le monstre en le touchant de sa croix. Il fit ensuite construire sur l'île une église pour les hommes et une autre pour les femmes sur l'îlot voisin, appelé aujourd'hui Enthos.

Sur les pentes orientales de l'île, une grotte naturelle servit d'ermitage à l'Abouna qui à sa mort fut enterré dans l'île. Le sable provenant du fond de son tombeau possède, selon la croyance populaire, des propriétés curatives miraculeuses. De nombreux pèlerins se rendent encore dans l'île le 19 de chaque mois, selon le calendrier éthiopien. Le 31 décembre de notre calendrier, on y célèbre la grande fête de l'Annonciation.

L'église actuelle, de forme circulaire et bâtie en pierre rouge, entourée d'une enceinte lui assurant un calme parfait, remonte à l'époque de Iyasou le Grand (1687), mais elle est construite sur une structure plus ancienne datant probablement de l'époque d'Amda Syôn (milieu du 14e siècle). Une influence iranienne apparaît dans les peintures, notamment dans la représentation des vêtements des archanges. A voir aussi, un ancien candélabre en bois. Actuellement, une quarantaine de moines vit encore dans ce monastère que seuls les hommes peuvent visiter.

ILE DE DEBRE MARYAM

A la sortie du port de Bahar Dar, près de la rive orientale du lac, se trouve l'île de Debré Maryam. La légende raconte qu'à l'arrivée de l'Abouna Thadéwos, les eaux qui séparent l'île du rivage s'ouvrirent sous les pieds du saint, qui put ainsi trouver refuge ici où, par la volonté du Négus Amda Syôn Ier, fut érigée la première église dans la première moitié du 13e siècle. Reconstruite par Théodoros II dans la deuxième moitié du 19e siècle, elle fut habitée par de très nombreux moines.

C'est ici que l'empereur Iyasou le Grand réunit en Concile en 1688 les dignitaires de l'Eglise et les plus importants moines du pays, pour discuter du thème de l'union des Natures du Christ, problème qui provoquait de fortes divisions dans le clergé éthiopien. Réduite à l'état d'une pauvre paillote, l'église abrite aujourd'hui encore un petit trésor, un tétra évangile manuscrit et illustré datant du temps de Fasilades, un autre évangéliaire datant de la fin du 14e siècle, ainsi que quelques cloches, croix et divers panneaux peints.

Source : Ethiopie : Au fabuleux pays du Prêtre Jean, Edition 2003

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