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Toi qui viens d'Ethiopie...
26 avril 2007

Les Fantômes de l’Ogaden

par Skander Houidi

L’attaque d’un site pétrolier chinois dans l’Ogaden, une province orientale de l’Ethiopie, rappelle que ce pays, pour hégémonique qu’il soit dans la Corne de l’Afrique, est fragilisé par son implication dans le bourbier somalien.

Mardi 24 avril à l’aube, un commando de 200 hommes, selon l’agence de presse Chine nouvelle, attaque un site de prospection pétrolière de la compagnie Zhongyuan Petroleum Exploration Bureau près de la ville d’Obala, dans le nord de l’Ogaden (Ethiopie). Bilan : 65 soldats et ressortissants Ethiopiens, ainsi que 9 Chinois tués. Le Front national de libération de l’Ogaden (ONLF), qui a revendiqué l’assaut, affirme en outre détenir 7 travailleurs chinois. 

Comme à chaque fois qu’elle est visée, l’Ethiopie incrimine son frère ennemi, l’Erythrée. Les relations entre les deux pays sont on ne peut plus tendues, notamment depuis qu’Asmara est soupçonné de soutenir les Tribunaux islamiques somaliens, d’après le principe bien connu : « l’ennemi de mon ennemi est mon ami ». Une accusation qui a provoqué cette réplique cinglante du ministre érythréen de l’Information : l’ONLF résulte de « l’échec de la politique raciale de l’Ethiopie fondée sur la (division) en groupes ethniques ». D’après Francis Soler, Rédacteur en chef de La lettre de l’Océan indien, il est clair que « l’Erythrée, qui recherche tout ce qui peut nuire à son voisin, accueille des rebelles éthiopiens dans des camps d’entraînement, avant de tenter de les exfiltrer en Ethiopie ». Ce qui le surprend d’avantage, c’est le succès de cette attaque et le nombre présumé des assaillants. Certes les autonomistes de l’Ogaden, « soutenus par une partie de la population, ont une réelle influence politique » dans la région, mais, hormis quelques accrochages avec les soldats éthiopiens en 2006, la branche armée n’avait plus fait parler d’elle, de manière aussi spectaculaire, depuis des années. La décision de reprendre les activités militaires date sans doute de l’échec de la participation aux élections de 2005. Après avoir engagé l’ONLF sur cette voie, le pouvoir éthiopien l’a marginalisé en emprisonnant ses leaders. Le front somalien fragilisant Addis Abeba, l’ONLF a dû juger « que la situation était favorable pour passer à l’offensive ». 

Y a-t-il un lien entre cette agression et l’implication de l’Ethiopie dans le conflit somalien ? A Addis Abeba, on assure que l’ONLF a combattu aux côtés des islamistes somaliens. Dans un communiqué à l’AFP, celui-ci a assuré n’avoir « rien à voir » avec la Somalie et affirme que son action s’inscrit dans une logique de « complète auto-détermination pour le peuple de l’Ogaden ». Une annonce qui nous renvoie trente ans en arrière, à l’été 1977, lorsque débutait la guerre de l’Ogaden dans laquelle l’Ethiopie et la Somalie se disputaient cette région éthiopienne peuplée majoritairement de somalis musulmans. Pour Francis Soler, « le mode opératoire, classique, ne ressemble pas à celui d’Al-Qaïda et les Tribunaux islamiques sont trop occupés en Somalie… ». Mais une chose est sûre : « Les solidarités ethniques et religieuses entre Somaliens et Somalis éthiopiens sont renforcées par la violence de l’offensive éthiopienne à Mogadiscio ». Si l’Ethiopie n’en sort pas « rapidement vainqueur », le bourbier somalien pourrait lui poser des problèmes insolubles.

Source : Marianne, 26 avril 2007

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