La Reine de Saba

Des Hébreux, n'ayant pu ou voulu traverser la mer Rouge, durent fuir la ville de Memphis devant la brutalité égyptienne désireuse de venger la noyade d'Aménophis et de son armée. Traversant les déserts, ils s'installèrent dans la région du Simien. Dans l'éloignement et les siècles qui s'écoulaient, le culte du dragon remplaça celui de Jéhovah. Un orfèvre local, Aguébo, en voyage à Thèbes, rencontrant une courtisane juive, renoua avec la religion de ses ancêtres. De retour au Simien, après quatorze ans d'absence, il épousa la fille du roi. Ce dernier ne tarda pas à mourir et Aguébo lui succéda. Déterminé à lutter contre l'idolâtrie et les sacrifices dûs au dragon, l'appâtant avec une brebis discrètement empoisonnée, il l'élimina au nom de Jéhovah.

Le temps passa et le souverain n'ayant pas de descendance mâle, sa fille, Mémmété, fut choisie par la popualtion comme future reine, à condition de rester vierge. Son nom changea en Makéda "celle qui est pure". La souveraine, ayant conquis le Yémen, partageait son temps entre le royaume d'Axoum et celui de Saba. Entendant Tamdrin, un négociant, vanter la sagesse et la richesse de Salomon, fils de David, elle entreprit de partir vers le royaume de Judée. La reine et sa suite, apportant de nombreux cadeaux, débarquèrent à Jérusalem. Emerveillée par la sagesse du roi, elle refusa cependant une demande en mariage, sa virginité étant promise à son peuple. Salomon accepta de renoncer à toute relation amoureuse mais si la reine venait à prendre, sans son consentement, un objet royal, la promesse serait caduque.

Un soir, après un repas particulièrement riche et épicé accompagné de boissons échauffantes, Makéda s'endormit. Dans la nuit, assoiffée, elle attrapa la carafe d'eau du roi, abandonnée "innocemment" près de sa couche. Salomon surgit de derrière une tenture, le pacte était rompu !

Peu de temps après, la jeune fille, enceinte, écartée de Jérusalem par des jalousies internes, quitta la Judée afin de répandre le judaïsme sur ses propres territoires. Un fils naquit, Makéda le baptisa Ménélik (peut-être Ben Malik "Fils de Roi"). Quand l'enfant eut sept ans, elle revint régner sur Axoum mais, menacée par les Axoumites, elle envoya l'enfant vers Salomon. Le souverain l'éduqua pendant de nombreuses années, puis le choisit pour successeur à la tête du royaume de Judée. Ménélik refusa, préférant le trône d'Ethiopie. Le roi, déçu, accepta ce départ et organisa une escorte constituée des fils des grandes familles de Jérusalem dont le rôle était d'aider le futur maître de l'Abyssinie. Avant de s'éloigner, ces derniers dérobèrent l'Arche d'Alliance, conçue pour protéger les tables de pierre sur lesquelles sont gravés les Dix Commandements. Malgré une poursuite effrénée, Ménélik et l'Arche parvinrent à Axoum.

Illustration de la victoire du monothéisme sur l'idolâtrie, cette rencontre, mentionnée dans la Bible, reste invérifiable au niveau historique.

La dynastie salomonide inaugurée par Ménélik trouva, dans la garde de l'Arche, une approbation divine pour sa lignée. En tout cas, elle fit preuve d'une longévité peu commune : les chroniques impériales attestent d'une succession ininterrompue jusqu'au Xème siècle après J.-C., d'une éclipse de trois cents ans sous la dynastie Zagoué, sa réapparition au XIIIème avec Ekuno Amlak et sa fin, lors de la disparition d'Haïlé Sélassié, le dernier roi des rois, en 1975.

Source : Ethiopie (Editions Marcus)

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